Un tournant controversé

Réforme du DEP: entre prudence et inquiétude sur le futur dossier de santé (DES) (update)

Le remplacement du DEP par le dossier électronique de santé (DES) divise. Tandis que la Confédération vante une simplification du système, les acteurs du terrain redoutent une perte de confiance du public et un virage trop rapide.

(Source: Polina Tankilevitch/Pexels)
(Source: Polina Tankilevitch/Pexels)

Mise à jour du 10 novembre 2025: L’annonce du Conseil fédéral de remplacer le dossier électronique du patient (DEP) par un nouveau dossier électronique de santé (DES) continue de susciter des réactions contrastées. Alors que la Confédération met en avant une simplification et une meilleure adoption du numérique dans la santé, des organisations comme CARA et la Société numérique redoutent une transition trop rapide et ses effets sur la confiance du public.

L’association CARA – qui gère les DEP des cantons de Fribourg, Genève, Jura, Valais et Vaud – salue la volonté de la Confédération d’améliorer la gouvernance et l’interopérabilité du système, mais juge sa communication «extrêmement maladroite». Elle estime qu’en présentant le DEP comme dépassé, Berne relègue au second plan les acteurs engagés depuis des années dans son développement.

L’organisation rappelle que, contrairement à ce que laisse entendre la Confédération, le DEP «reste utile et utilisé» par les patients qui souhaitent accéder facilement à leurs documents médicaux. CARA évoque également le projet de mutualisation avec les communautés Emedo et eSANITA, qui devrait aboutir en 2026 à une plateforme DEP commune à l’échelle nationale.

L’association plaide pour une transition progressive vers le futur dispositif, afin d’éviter que les investissements consentis et les données déjà enregistrées ne soient perdus. Le futur DES, lui, «ne sera pas disponible au mieux avant cinq ans», précise CARA, qui défend d’ici là la continuité du système existant.

Du côté de la Société numérique, la critique est plus fondamentale. L’association estime que le projet de DES, tel que conçu, «risque de perdre la confiance de la population». La création automatique d’un dossier pour chaque citoyen, combinée à une centralisation accrue des données, soulève selon elle des questions de transparence, de contrôle et de sécurité.

L’organisation dénonce également la fin du caractère facultatif: chaque personne recevrait automatiquement un dossier, ce qui, selon elle, contrevient au principe d’autodétermination numérique garanti par la Constitution. Elle y voit une centralisation excessive et un risque d’inégalités entre assurés, notamment en matière de primes.

Société numérique appelle à un débat public sur la gouvernance des données de santé et sur la place accordée aux citoyens dans la gestion de leur dossier. L’association rappelle que, comme pour l’e-ID, la confiance du public repose sur la transparence et le respect du volontariat.
 

News du 5 novembre 2025: Le Conseil fédéral a décidé d'une réorientation fondamentale dans le domaine de la santé numérique en Suisse. L'organe exécutif a transmis au Parlement un message concernant une nouvelle loi fédérale sur le dossier électronique de santé (LDSan). Celle-ci vise à remplacer l'actuel dossier électronique du patient (DEP) par un nouveau système, le dossier électronique de santé (DES). Le communiqué des autorités précisent que le DES sera créé automatiquement pour chaque citoyen et regroupera toutes les informations de santé pertinentes en un seul endroit.

Ce changement de cap est motivé par la faible adoption du système actuel. D'après le Conseil fédéral, le DEP repose sur une structure complexe avec de nombreux prestataires privés, ce qui complique son ouverture par les utilisateurs. Ces obstacles ont conduit à une utilisation qui est restée bien en deçà des attentes. La nouvelle loi doit permettre de surmonter ces difficultés.

Le DES est conçu pour être centré sur l'individu et son parcours de santé. Il est prévu que les principales données médicales pertinentes soient rassemblées en un unique emplacement numérique. L'objectif est de rendre ces informations accessibles partout et à tout moment, notamment dans les situations d'urgence, indépendamment du domicile du patient, du lieu de traitement ou du professionnel de santé consulté.

Avec l'introduction du DES, une obligation d'utilisation sera imposée aux prestataires du domaine ambulatoire. Les médecins, pharmaciens, physiothérapeutes et autres professionnels de la santé exerçant à la charge de l’assurance obligatoire des soins devront utiliser le DES. Ils auront l'obligation d'y saisir toutes les données jugées pertinentes pour un traitement médical.

La nouvelle loi fédérale sur le dossier électronique de santé (LDSan) redéfinit également les tâches, les compétences et le financement entre la Confédération et les cantons. Cette restructuration a pour but de clarifier la gouvernance du système, qui est actuellement fragmentée. Le dossier accompagnera son titulaire tout au long de sa vie, des examens préventifs au traitement des maladies.
 

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