Règlementation

Règlementation des plateformes web: La Confédération veut ouvrir le débat avant la boîte de Pandore

Dans un rapport, l’Ofcom s’est penché sur les effets positifs et négatifs des réseaux sociaux et autres intermédiaires sur le débat public, ainsi que sur le cadre règlementaire actuel en Suisse et dans l’UE. Inquiet de l’emprise et de l’impact de ces plateformes privées, le Conseil fédéral souhaite ouvrir le débat avant de proposer une éventuelle règlementation.

Dans un communiqué, le Conseil fédéral exprime son souhait d’un large débat sur la règlementation des plateformes de communication, autrement dit les Facebook, Twitter, Google et consorts. S’appuyant sur un rapport de l’Ofcom, l’exécutif constate que ces intermédiaires privés jouent un rôle grandissant dans le débat public sans être soumis aux règles journalistiques, mais en privant la presse d’une part importante de ses recettes.

Des plateformes qui façonnent le débat public

Le rapport souligne que ces plateformes peuvent servir à répandre des contenus haineux et de la désinformation, mais aussi préserver la liberté d’expression et donner un écho à des opinions moins représentées. Le Conseil fédéral s’inquiète notamment de l’emprise que ces entreprises privées globales ont sur le débat public suisse, de leurs algorithmes opaques déterminant ce qui est dit ou non dans l’espace numérique et du manque de moyens pour les utilisateurs de s’y opposer.

Alors que l’Europe et les Etats-Unis ont commencé à adopter des dispositions légales spécifiques pour ces firmes, le Conseil fédéral estime «qu’une large discussion sur la question de l’implication sociale et de la gouvernance des intermédiaires est nécessaire en Suisse». Le DETEC est par ailleurs chargé d’indiquer d’ici fin 2022 si et comment les plateformes de communication pourraient être réglementées.

Protection et censure algorithmiques

Alors que les plateformes sont aujourd’hui soumises aux lois en vigueur, les règlementer spécifiquement sur des sujets tels que les discours haineux et la désinformation, c’est aussi ouvrir la boîte de Pandore. Comme le souligne le rapport de l’Ofcom: «Il va sans dire que toute réglementation étatique de la communication publique doit être réévaluée en permanence à l’aune des libertés de communication. Les informations ou idées qui offensent, choquent ou dérangent entrent en principe dans le champ de protection de la liberté d’expression, indépendamment de leur véracité ou non. L’Etat ne peut poser des limites à l’expression que si les conditions justifiant des restrictions aux droits fondamentaux sont remplies: la restriction doit être fondée sur une base légale suffisamment précise, justifiée par un intérêt public ou par la protection d’un droit fondamental d’autrui, et être proportionnelle au but visé». Sans compter que l’application d’un telle règlementation se heurtera aux problèmes de territorialité du droit, de l’anonymat des utilisateurs, et de la capacité technique des exploitants à mettre au point des outils de régulation conformes aux différentes législations.

La règlementation n’est cependant pas la seule voie abordée dans le rapport de l’Ofcom. L’éducation reste une arme redoutable tant contre les discours haineux que contre la désinformation. Et il y a l’autorégulation des plateformes qui, sous la pression conjuguée des autorités, de leurs utilisateurs et de leurs collaborateurs, travaillent (avec plus ou moins de succès) à automatiser la détection et la suppression de contenus non-désirables et autres bots. Le débat ne fait que commencer.

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