Détection précoce de la septicémie

L'IA promet de détecter la septicémie à un stade précoce et sauver des vies

par Joël Orizet et traduction/adaptation ICTjournal

Des chercheurs de l'Université Johns Hopkins ont développé un système d'alerte précoce basé sur l'intelligence artificielle, qui promet d'améliorer les chances de survie des patients atteints de septicémie. Le système pourrait sauver des milliers de vies chaque année et être utilisé un jour dans d'autres domaines en médecine.

La chercheuse en informatique médicale Suchi Saria dirige le Machine Learning and Healthcare Lab à l'université Johns Hopkins. (Source : Will Kirk / Johns Hopkins University)
La chercheuse en informatique médicale Suchi Saria dirige le Machine Learning and Healthcare Lab à l'université Johns Hopkins. (Source : Will Kirk / Johns Hopkins University)

La septicémie, plus communément appelée empoisonnement du sang, est une maladie potentiellement mortelle. Elle survient à la suite d'une infection: des agents pathogènes tels que des bactéries, des champignons ou des virus pénètrent dans le corps, s'y multiplient et attaquent les organes. La manière dont les défenses de l'organisme réagissent est toutefois déterminante. Une septicémie n'apparaît en effet que lorsque les agents pathogènes surmontent les mécanismes de défense du système immunitaire, se répandent dans la circulation sanguine, déclenchent une réaction excessive du système immunitaire, le corps attaquant par conséquent ses propres organes dans sa lutte contre l'infection.

En Suisse, on estime que 15’000 personnes sont touchées chaque année par une septicémie - dans un bon tiers des cas, l'issue est fatale malgré un traitement. Non traitée, une septicémie peut entraîner la mort en quelques heures. Il est donc d'autant plus important de reconnaître les premiers symptômes à temps. Car plus le diagnostic et le traitement sont précoces, plus les chances de survie sont élevées.

Risque de mortalité réduit de 20%

Pour aider les professionnels de la santé à diagnostiquer les symptômes de la septicémie à un stade précoce, une équipe de chercheurs de l'université Johns Hopkins, aux Etats-Unis, a développé un système d'alerte précoce qui puise dans l'intelligence artificielle. Les chercheurs ont testé ce système dans le cadre d'une étude de cohorte à grande échelle. Plus de 4000 cliniciens de cinq hôpitaux et quelque 590’000 patients y ont participé.

Résultat principal: grâce au système basé sur l’IA, la détection des symptômes d'une septicémie a pu se faire plus rapidement - le gain est de plusieurs heures - qu'avec les méthodes existantes, réduisant ainsi de 20% la probabilité que les patients en décèdent.

«C'est le premier cas où l'IA est utilisée au chevet du patient, par des milliers de prestataires de soins et où nous pouvons constater que des vies sont sauvées», déclare Suchi Saria, directrice-fondatrice du Malone Center for Engineering in Healthcare à l'université Johns Hopkins et auteure principale de l'étude. Grâce à ce système, des milliers de patients atteints de septicémie pourront être sauvés à l'avenir. L'approche sera en outre appliquée dans d'autres domaines afin d'améliorer d’autres traitements.

Analyse des symptômes en lien avec les antécédents médicaux

Le système mis au point est baptisé Targeted Real-time Early Warning System (TREWS). Il passe au crible les dossiers médicaux et les enregistrements cliniques afin d'identifier les patients présentant un risque de complications potentiellement mortelles, précise le communiqué de l'Université Johns Hopkins. Un algorithme compare en outre les antécédents médicaux du patient avec ses symptômes

et les résultats de laboratoire. Le système indique ensuite au personnel médical si et dans quelle mesure une personne présente un risque de septicémie. TREWS propose également des traitements appropriés, par exemple l'administration d'antibiotiques.

Un taux de réussite de 82%

Au total, l'IA a identifié correctement 82% des cas de septicémie, écrivent les auteurs de l'étude dans la revue académique Nature Medicine. Et dans 38% des cas, le système a généré une alerte précoce, qu'un médecin a pu confirmer par la suite. Dans les cas particulièrement graves, le système d'alerte précoce a permis de détecter la maladie en moyenne près de six heures plus tôt qu'avec les méthodes habituelles.

IA explicable

Selon le communiqué, ce résultat représente une nette amélioration par rapport aux le machine learning et destinés à aider à la prise de décision en médecine: il permet aux médecins de comprendre pourquoi l'IA émet certaines recommandations, selon l'Université Johns Hopkins.

«Il s'agit d'une percée à bien des égards. Jusqu'à présent, la plupart de ces systèmes se trompaient bien plus souvent qu'ils n'avaient raison», déclare Albert Wu, professeur à l'université Johns Hopkins de Baltimore et co-auteur de l'étude. Et de tels faux-positifs alertes pouvaient finir par saper la confiance en ces systèmes.

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