Transformation des RH

Postfinance déploie un système numérique pour s’évaluer entre collègues

Postfinance expérimente un système d'évaluation numérique qui permet de se distribuer des bons points entre collègues, sous forme de «Powercoins», pour récompenser des comportement jugés positifs. Un tiers des 3’500 employés de l’entreprise se sont déjà portés volontaires, rapporte la SRF.

Postfinance présente son système de PowerCoins comme un instrument de changement numérique. (Source: Postfinance)
Postfinance présente son système de PowerCoins comme un instrument de changement numérique. (Source: Postfinance)

Et si les employés pouvaient savoir en permanence si leur travail est apprécié plutôt que d’attendre l’entretien annuel d'évaluation? Postfinance explore très concrètement le concept. Un reportage de l'émission «10vor10» de la télévision suisse alémanique (SRF) montre comment le bras financier de la Poste suisse mise sur la culture du feedback immédiat. L'entreprise a mis en place un système d'évaluation numérique basé sur la distribution de jetons nommés «Powercoins», lesquels sont distribués entre collègues et servent à récompenser un collaborateur pour des comportements jugés exemplaires par la direction. Par exemple pour avoir pris une décision courageuse ou s'être exposé. «Nous voulons que les gens s'exposent, défendent leurs opinions, voire se confrontent aux résistances - même contre les niveaux hiérarchiques», précise Roger Lötscher, responsable de la transformation du personnel chez Postfinance. Le reportage de la SRF indique qu’un bon tiers des 3’500 employés de Postfinance se sont déjà portés volontaires pour utiliser le système Powercoins.

Davantage de pression ou de motivation?

Le nombre de PowerCoins gagné par un collaborateur n’est pas nécessairement confidentiel. «Les employés peuvent, s'ils le souhaitent, rejoindre une équipe et au sein de cette équipe, les PowerCoins sont visibles. S’ils ne rejoignent par une équipe, les PowerCoins ne sont pas visibles pour les autres et seulement l'employé connaît son score», explique un porte-parole de Postfinance joint par ICTjournal.

La nature volontaire de cette participation est mise en doute par David Roth de Syndicom: les PowerCoins étant explicitement qualifiés d’instrument de changement numérique, «toute personne qui n'y participe pas montre qu'elle n'est pas apte au changement numérique. La pression pour participer est énorme», confie le syndicaliste devant les caméras de la SRF. Il prévient en outre que ce type de système d'évaluation entre collègues ouvre la porte à des brimades à l'encontre des employés jamais récompensés.

Le responsable de la transformation du personnel chez Postfinance se défend, soulignant qu’il ne s’agit pas d’un outil de jugement mais permettant d'encourager les comportements positifs. C'est en effet l’un des objectifs poursuivis par les nudges et autres dispositifs de gamification auxquelles appartiennent les PowerCoins, à l'heure où toujours plus de solutions numériques sont à disposition des entreprises pour mesurer et agir positivement sur l'expérience de leurs collaborateurs (pour approfondir, lire notre dossier consacré à l'expérience employé).

Des outils fréquents et appréciés

Les solutions de distribution de points sont aujourd'hui loin d'être rares dans les entreprises. Plus de la moitié des 900 employés interrogés en 2019 pour une enquête de TalentLMS indiquent recevoir des points via une app ou un logiciel. La gamification la plus fréquente étant toutefois l'attribution de badges. L’étude souligne en outre que ces mesures sont vues d’un bon œil: la plupart des employés estiment ainsi que la gamification les rend plus productifs (89%) et plus heureux au travail (88%). Les logiciels et applications de formation sont cités comme les plus propice à intégrer davantage de fonctionnalités de gamification. Suivent les solutions de communication, puis les logiciels de contact (RH et CRM).

Bien que visiblement appréciés des employés selon l’étude TalentLMS, les outils de distribution de bons point tels que les PowerCoins de Postfinance ont de quoi générer la controverse: ils évoquent immanquablement des systèmes de société basée sur la réputation des citoyens, comme le concept de crédit social en Chine ou celui dépeint dans l’épisode Chute libre de la série «Black Mirror».

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