Développement et transparence

A Genève, Gordon Brown et Tim Berners-Lee font l’apologie du web

| Mise à jour

L’ancien premier ministre britannique Gordon Brown et le co-inventeur du web Tim Berners-Lee ont débattu mercredi à Genève de l’avenir du web. Ils ont dressé un portrait élogieux du pouvoir d’internet en matière de développement et de démocratie et ont appelé de leurs vœux un web plus accessible, plus ouvert et plus robuste.

Source: ICTjournal
Source: ICTjournal

Invités par l’Université de Genève, l’ancien premier ministre britannique Gordon Brown et le co-inventeur du web Tim Berners-Lee ont débattu mercredi de l’avenir du web, devant un auditoire comble. Les deux intervenants prestigieux ont surtout profité de la table ronde pour afficher leur foi dans les vertus d’internet pour le développement économique et social des populations les plus pauvres. Tim Berners-Lee a ainsi évacué rapidement les questions portant sur les problèmes de verrouillage (Facebook, Apple) et de monopole (Facebook, Google) que rencontre actuellement la toile. Avec un débit extrêmement rapide, contrastant avec le flegme tout britannique de Gordon Brown, il a réitéré son appel pour un web plus ouvert – en privilégiant par exemple l’emploi de sites optimisés pour les mobiles plutôt que d’apps fermées – tout en soulignant que des menaces de monopole ont existé de tout temps.

Aide au développement

L’ancien informaticien du CERN et le politicien anglais avaient toutefois une autre priorité: parler de l’utilité du web dans l’aide au développement et des projets de la World Wide Web Foundation, créée par Tim Berners-Lee. A tour de rôle, ils ont ainsi énuméré de nombreux cas concrets où l’accès aux informations profite à des populations défavorisées. Une initiative récente de la fondation se propose par exemple d’aider les agriculteurs en Afrique grâce à des informations sur les techniques, la météo ou les prix du marché. Dans le domaine de la santé, l’utilisation des téléphones portables permet d’assister des patients dans des régions souffrant de pénurie de personnel médical, à l’instar de la Sierra Leone et du Niger. Ou encore dans l’éducation, internet permet aux enseignants de régions reculées de disposer des ressources pédagogiques qui leur font habituellement défaut.
Tim Berners-Lee a toutefois reconnu que de nombreuses barrières empêchent pour l’heure la réalisation de ce potentiel. Ainsi, 80% de la population mondiale n’a pas encore d’accès à internet et, bien que les téléphones portables se propagent, beaucoup ne sont pas encore équipés d’un navigateur web. Autre obstacle, le manque d’informations sur la toile dans les langues locales et l’illettrisme. Dans la même veine, Gordon Brown a également abordé le coût prohibitif de l’internet à large bande, cinq fois plus élevé en Afrique qu’en Inde.

Web, révolutions et transparence

Avec un politicien et un spécialiste du web, les révolutions tunisienne et égyptienne et l’affaire Wikileaks étaient des sujets inévitables. Concernant le printemps arabe, Tim Berners-Lee et Gordon Brown sont convaincus que, malgré l’existence d’autres facteurs, les changements de régime n’auraient pas eu lieu sans les technologies du web – out tout au moins pas à ce rythme. Plus généralement, l’ancien résident de Downing Street voit dans internet «un outil formidable pour connecter les individus et les mobiliser autour d’intérêts communs par delà les frontières». Les deux conférenciers ont d’ailleurs exprimé leur souci que le web soit exploité par des régimes autoritaires out tout bonnement bloqué. Tim Berners-Lee a ainsi appelé les chercheurs à rendre internet plus résilient et le protocole HTTP plus robuste, de façon à assurer le fonctionnement du web en mode distribué, lorsque les fournisseurs d’accès sont paralysés.
Interrogé au sujet des câbles diffusés par Wikileaks, Gordon Brown a estimé que le mouvement vers un mode de gouvernement responsable et transparent est de toute manière inexorable et il a annoncé «la fin du secret diplomatique». Avec le sourire, il a également souligné que, n’en déplaise aux diplomates, les messages entre gouvernements ne transitent plus vraiment via les ambassades, ce qui explique le nombre réduit de véritables révélations par Wikileaks.

Data.gov

Les deux conférenciers ont également abordé la publication de données publiques, une initiative chère à Tim Berners-Lee à laquelle le Royaume-Uni a rapidement adhéré. «Alors que je dois toujours faire de grands efforts pour convaincre mes interlocuteurs, lorsque j’ai parlé à Gordon Brown de mon projet, je me suis trouvé à enfoncer une porte ouverte» a raconté en plaisantant Berners-Lee. A l’époque premier ministre, Gordon Brown a d’emblée monté une équipe chargée de déterminer les données à disposition du gouvernement qui pourraient profiter au public. Fruit de ce travail, le site data.gov.uk héberge aujourd’hui plus de 5'400 fichiers de données publiques gratuites sur des thèmes aussi divers que les transports, la santé et l’éducation, qui peuvent être intégrées, combinées et visualisées. En matière de cyberadministration, Tim Berners-Lee veut encore aller plus loin et il imagine qu’un jour, lorsque tout le monde aura accès aux services publics en ligne, il sera possible de supprimer l’offre publique offline. Gordon Brown ne commente pas, mais on peut supposer que cet idéal là ne réjouit pas le travailliste.

 


 

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