Un tiers du temps gagné grâce à l’IA est consacré à des tâches peu motivantes
Selon une enquête menée par Adecco, les salariés utilisent de plus en plus l’IA et gagnent en moyenne deux heures par jour à l’aide de ces technologies. Toutefois, un tiers de ce temps est consacré à des tâches peu valorisantes, soulignant un besoin d’accompagnement stratégique.

Le groupe helvétique Adecco a publié son sixième rapport annuel Global Workforce of the Future. Réalisée auprès de 37’500 employés dans 31 pays et 21 secteurs d’activité, cette étude examine comment l’essor de l’intelligence artificielle (IA) reconfigure les environnements professionnels et les attentes des salariés. Message central: si ces technologies suscitent un engouement massif, seule une approche centrée sur l’humain permettra d’en tirer un bénéfice durable.
Facteur le plus influent dans la vie professionnelle
En 2025, l’IA surpasse l’incertitude économique et le travail flexible comme facteur le plus influent dans la vie professionnelle. Selon Adecco, les trois mégatendances perçues comme les plus déterminantes sont désormais: l’IA générative, l’IA «classique» et les agents IA, reléguant la flexibilité et la santé mentale en quatrième et cinquième position. 71% des répondants déclarent n’avoir aucun frein à utiliser l’IA, contre seulement 19% en 2024. Plus de deux tiers des employés estiment que l’IA crée plus d’emplois qu’elle n’en détruit et environ trois quarts affirment qu’elle leur permet d’accomplir des tâches auparavant inaccessibles.
En Suisse, cette perception est encore plus marquée: 86 % des travailleurs considèrent que l’IA génère de nouvelles opportunités professionnelles, et 90% observent une évolution des métiers. Seuls 12% redoutent une suppression de poste liée à l’automatisation, un taux bien inférieur à la moyenne mondiale.
Gains de temps, mais valeur ajoutée à préciser
Les salariés interrogés déclarent gagner en moyenne deux heures par jour grâce à l’IA, soit le double des estimations de 2024. Toutefois, un tiers de ce temps serait consacré à des tâches similaires ou peu stimulantes. Les perceptions de productivité sont déconnectées des gains réels mesurés par les entreprises, souligne le rapport, qui appelle les dirigeants à mieux orienter les efforts vers des activités à plus forte valeur ajoutée.
L’étude révèle également que 37% des employés sont désormais considérés comme «future-ready», contre 11% seulement l’an dernier. Ces profils, adaptables et technophiles, incarnent une transformation rapide des mentalités face à l’IA. Ils se disent davantage capables de mesurer la valeur de leur travail, de comprendre les objectifs de l’entreprise et de se projeter à cinq ans dans l’évolution de leurs compétences.
En Suisse, 61% des salariés déclarent ressentir un sens clair et quotidien dans leur travail, contre une moyenne mondiale de 46 %. Ce sentiment de finalité professionnelle constitue un puissant levier de fidélisation: 99% des employés qui trouvent un sens profond à leur activité prévoient de rester dans leur entreprise, alors qu’ils ne sont que 53 % chez ceux qui déclarent ne jamais en ressentir.
«Les travailleurs prêts pour l’avenir s’épanouissent lorsqu’ils disposent de repères clairs, d’objectifs mesurables et d’opportunités de développement continu», explique Daniela Seabrook, Chief HR Officer du Groupe Adecco. L’étude note aussi un lien direct entre le sentiment de sens et la fidélité: 99% des salariés qui trouvent un sens profond à leur travail se montrent bien plus fidèles à leur entreprise, alors qu’ils ne sont que 53% chez ceux qui déclarent ne jamais avoir cette perception.
Les agents IA bien accueillis
Plus de la moitié des professionnels sondés s’attendent à collaborer avec un agent IA dans les douze mois à venir et deux tiers accueilleraient favorablement un tel outil comme un «collègue» numérique. Mais la confiance dans l’IA varie selon les responsabilités: elle atteint 6,6 sur 10 chez les dirigeants, contre 3,3 chez les employés non cadres.
Les salariés font confiance à l’IA pour des tâches techniques (formation, automatisation, fixation d’objectifs), mais préfèrent des interlocuteurs humains pour les décisions sensibles, comme les entretiens de carrière ou le recrutement.
Parallèlement, les inquiétudes concernant la protection des données personnelles ont bondi en un an, tandis que la confiance dans la compréhension des risques par les dirigeants s’est renforcée. Le rapport appelle les entreprises à communiquer davantage sur les garde-fous éthiques et à démontrer la sécurité de leurs systèmes.
Trois leviers d’action
Adecco invite les organisations à combiner performance technologique et responsabilité sociale. «Les organisations doivent comprendre que l'adoption de l'IA n'est plus une option, mais un impératif stratégique», rappelle Denis Machuel. «Investir dans une gouvernance transparente, des cadres éthiques et une formation continue est le seul moyen de dégager des gains de productivité durables tout en conservant la confiance.»
Les auteurs du rapport recommandent trois leviers d’action: instiller du sens, démontrer la valeur du travail et bâtir la confiance dans la refonte des métiers. À l’heure où l’IA redéfinit le quotidien professionnel, le CEO d’Adecco souligne que «ce sont les personnes, et non la technologie, qui permettront de constituer une main-d'œuvre résiliente, flexible et adaptée aux besoins futurs».