Demande énergétique & IA

La concentration des datacenters pèse sur les réseaux électriques locaux

La multiplication des datacenters, impulsée par l'essor de l’IA, suscite des inquiétudes quant à son impact sur la demande énergétique: leur concentration dans certaines régions amplifie les risques de surcharge sur les réseaux d’électricité et les impacts écologiques au niveau local.

(Source: NASA sur Unsplash)
(Source: NASA sur Unsplash)

Pour accompagner le développement accéléré des solutions d'intelligence artificielle (IA), les investissements dans les centres de données explosent. Cette croissance fait craindre une augmentation de la demande en électricité, un phénomène qui ne sera pas sans conséquences. 

Selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), le rythme des investissements dans les datacenters a doublé aux Etats-Unis au cours des deux dernières années, tandis que la Chine et l'Union européenne enregistrent également des hausses significatives. Les Etats-Unis, la Chine et l'Europe concentrent à eux seuls une grande partie de ces infrastructures. Aujourd'hui, les centres de données représentent environ 1% de la consommation mondiale d'électricité, ce chiffre passant toutefois à 2 ou 4% dans les grandes économies telles que les Etats-Unis et la Chine. 

Selon le scénario de référence établi par l’AIE, d’ici 2030, les datacenters seront responsables d'environ 10% de la croissance de la demande totale d'électricité au niveau mondial, soit à peu près la même proportion que pour le dessalement, et moins d'un tiers de la croissance de la demande pour les véhicules électriques et la climatisation des locaux dans le secteur du bâtiment. 

Concentration géographique et tensions énergétiques locales

Un des aspects particuliers des datacenters tient à leur forte concentration au niveau géographique. Les entreprises privilégiant des zones proches de la clientèle, et bien desservies par la fibre optique et les infrastructures énergétiques. Aux Etats-Unis par exemple, dans cinq états particulièrement denses en centres de données, ces derniers comptent pour plus de 10% de la consommation d'électricité. Et en Irlande, ce type d’installations est à l'origine de plus de 20% de l'ensemble de la consommation d'électricité du pays. 

Dans un article publié dans la Harvard Business Review, le chercheur Shaolei Ren (Université de Californie) souligne la répartition inéquitable des coûts environnementaux de l'IA entre différentes régions au sein d’un même pays ou à l'échelle globale. Le professeur attire l'attention sur le fait que les centres de données exercent une pression croissante sur les ressources en eau douce, nécessaires au refroidissement des serveurs, ainsi que sur la production d'électricité. 

Les stratégies actuelles de déploiement et de gestion de l'IA tendent souvent à intensifier ces inégalités environnementales, accentuées par les inégalités socio-économiques entre les régions, note encore le chercheur. Avant d’exposer un possible effet pervers: la technique de répartition géographique des charges de travail, qui vise à optimiser les coûts énergétiques globaux ou l'empreinte carbone, peut involontairement augmenter la consommation d'eau des datacenters dans les régions vulnérables. Qui plus est, la hausse de la demande d'énergie peut congestionner les réseaux électriques locaux, augmenter les coûts marginaux de la production d'énergie et, par conséquent, faire grimper les factures d'électricité des résidents. 

Des solutions se dessinent

Les chercheurs relèvent toutefois que la répartition des charges IA pourrait intégrer cette dimension et réduire ainsi les inégalités environnementales. La répartition pourrait redistribuer les flux de calcul de l'IA, en fonction de facteurs locaux en temps réel, tels que la proportion d'énergie fossile utilisée ou l'efficacité de la consommation d'eau. Cette approche permettrait aux entreprises d'adapter facilement leurs besoins en calculs en fonction des conditions locales entre les centres de données, en déplaçant la charge de calcul vers les régions où ils auront un moindre impact environnemental. 

La mise en œuvre d'un tel équilibrage équitable de la charge pose cependant des problèmes pratiques. Il est par exemple difficile, voire impossible, de prévoir les futures demandes d'IA, explique l’expert. Sans compter qu'il est essentiel de maintenir des performances constantes afin d’assurer la qualité des inférences. Pour relever ces défis, le chercheur propose d'utiliser des données historiques et des techniques avancées d'apprentissage par renforcement pour optimiser la répartition des charges IA au sein du réseau de datacenters distribués, en donnant la priorité à l'équité environnementale tout en minimisant l'empreinte écologique globale. 
 

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