Droits d'auteur

Les médias, ennemis et alliés d’OpenAI

Les médias ne sont pas à l'unisson face aux outils de GenAI formés à partir de leurs contenus. Alors que le New York Times a porté plainte contre OpenAI, le groupe Axel Springer est de son côté parvenu à un accord avec l'éditeur de ChatGPT. OpenAI a en outre reconnu et justifié ses infractions aux droits d'auteur.

(Source: David Smooke / Unsplash)
(Source: David Smooke / Unsplash)

Le New York Times est l’un des premiers médias à être monté au front contre l’exploitation de ses articles à des fins de formation d’IA génératives. L’été dernier, le prestigieux quotidien nord-américain avait ainsi adapté en ce sens ses conditions d'utilisation. Voilà qu’il se fait procédurier en portant formellement plainte contre OpenAI et Microsoft pour violation des droits d'auteur, accusant les deux entreprises partenaires d’alimenter et d'entraîner leurs applications avec ses millions d'articles sans son consentement.

Dans son article consacré à sa plainte, le New York Times précise que celle-ci ne comprend pas de demande concrète de dédommagement financier mais stipule que Microsoft et OpenAI devraient être tenues responsables de «milliards de dollars de dommages et intérêts légaux et réels» en rapport avec la «copie et l'utilisation illégales des œuvres d'une valeur unique du Times». Le Times précise qu’il s'était déjà adressé à Microsoft et à OpenAI en avril 2023 en vue de trouver un accord, notamment d’ordre commercial. 

Les discussions n'ont toutefois pas abouti. Le quotidien new-yorkais fait état de plusieurs exemples où un chatbot a fourni presque mot pour mot des extraits d'articles du Times, contenus dont l’accès était par ailleurs réservé aux détenteurs d'un abonnement payant. «Si le Times et d'autres organisations d'information ne sont pas en mesure de produire et de protéger un journalisme indépendant, il y aura un vide qu'aucun ordinateur ou intelligence artificielle ne pourra combler», soulignent les auteurs de la plainte. OpenAI a depuis réagi. Le Washington Post rapporte que la firme d’IA accuse le Times d'avoir manipulé les prompts  de manière ciblée afin de soutirer des données d'entraînement à ChatGPT. Selon OpenAI, les exemples cités dans la plainte «ne reflètent pas l'utilisation prévue ou le comportement normal de l'utilisateur» et enfreignent les conditions d'utilisation de l'entreprise. De nombreux exemples ne seraient d’ailleurs plus reproductibles aujourd'hui. 

Accord avec Axel Springer

D’autres acteurs importants de la sphère médiatique ne sont pas en confrontation avec OpenAI. Ainsi d’Axel Springer, qui a déjà biffé des postes en remplaçant certaines tâches par des outils d’IA. Mi-décembre, le groupe de presse allemand a annoncé un partenariat avec l’éditeur de CHatGPT, notamment concernant l'utilisation de contenu provenant de ses marques pour entraîner les LLM d'OpenAI. L’accord, dont les termes ne sont pas divulgués, inclut également l’implication d’OpenAI dans les projets du groupe de presse reposant sur la GenAI. Ainsi que l'utilisation d'articles accompagnés de leurs sources dans les réponses de ChatGPT, soulignant l'intérêt d’OpenAI pour fournir des informations d’actualité et pouvoir rivaliser avec les moteurs de recherche «Nous sommes ravis d'avoir mis en place ce partenariat mondial entre Axel Springer et OpenAI, le premier du genre. Nous voulons explorer les possibilités offertes par le journalisme assisté par l'IA, afin d'améliorer la qualité, la pertinence sociétale et le modèle économique du journalisme», a déclaré Mathias Döpfner, le CEO d'Axel Springer. 

Des montants ridicules proposés aux éditeurs 

En novembre dernier, OpenAI avait annoncé chercher des organisations prêtes à fournir leurs données pour entraîner ses IA. Aucune précision financière n'avait été donnée. Mais concernant les éditeurs de presse, il semblerait que la firme fondée par Sam Altman ne soit pas prête à généreusement mettre la main au porte-monnaie. Comme mentionné précédemment, on ne connaît pas le deal entre l'éditeur de ChatGPT et Axel Springer. Mais selon le média The Information, OpenAI a proposé au groupe allemand des dizaines de millions de dollars sur plusieurs années. Certains éditeurs se seraient vu proposer de 1 à 5 millions de dollars par an pour l'utilisation de leurs articles de presse. C’est fort peu… Des discussions auraient eu cours avec une douzaine de groupes dont Associated Press. 

En parallèle, il apparaît qu’Apple tente également de conclure des accords avec des éditeurs pour l'utilisation de leur contenu, toujours selon The Information. Qui fait observer: «Pour certains acteurs du secteur, les efforts déployés par OpenAI et Apple pour négocier des accords de licence en matière d'IA rappellent les accords conclus au cours de la dernière décennie par des entreprises technologiques telles que Facebook».  

OpenAI justfie son pillage

De façon générale, la position d’OpenAI au regard des droits d'auteur se fait toujours moins ambiguë. Dans une réponse adressée à la Chambre des lords britannique, relayées par le Daily Telegraph, l'entreprise fondée par Sam Altman reconnaît et justifie son pillage, se permettant en outre d'alerter sur le fait que sans pouvoir se servir dans les contenus protégés, ses outils d’IA génératives ne pourraient être développés: «Etant donné que le droit d'auteur couvre aujourd'hui pratiquement toutes les formes d'expression humaine [...] il serait impossible d'entraîner les meilleurs modèles d'IA actuels sans utiliser des documents protégés par le droit d'auteur. Limiter les données d'entraînement aux livres et dessins du domaine public créés il y a plus d'un siècle pourrait donner lieu à une expérience intéressante, mais ne permettrait pas de fournir des systèmes d'IA répondant aux besoins des citoyens d'aujourd'hui.»       
 

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