«Avec le cloud, l’IT devient un facilitateur de business»

En mai, Swisscom a annoncé une collaboration stratégique de plusieurs années avec Amazon Web Services (AWS). AWS lance maintenant son cloud local en Suisse avec un site à ­Zurich. Que signifie ce lancement pour Swisscom?

AWS est déjà présent comme entreprise en Suisse depuis un certain temps. En tant que fournisseur de cloud public, Swisscom propose déjà des services, du conseil et de l’exploitation sur AWS. Mais nous ne pouvions jusqu’à présent pas proposer de ­solution AWS aux clients B2B suisses souhaitant un stockage local des données, alors que c’était possible pour les services cloud de Microsoft Azure et de Google qui disposent de datacenters en Suisse. Nous sommes heureux que cela change et que nous puissions compléter notre offre multi-cloud hybride avec des services provenant du cloud AWS de la région de Zurich. Cela faisait longtemps que nous l’attendions.

A partir de quand Swisscom proposera-t-elle des services cloud AWS de la région Zurich à sa clientèle locale?

Nous commencerons à proposer des services AWS depuis la Suisse dès qu’AWS mettra officiellement en service son cloud local en Suisse. Cela devrait être le cas d’ici la fin de l’année.

Quels sont les avantages de la région cloud AWS Zurich pour les clients B2B de Swisscom?

Nous pouvons désormais répondre aux exigences de clients de secteurs très réglementés et sensibles comme la finance, la santé, les administrations publiques, qui sont tenues ou souhaitent conserver leurs données localement en Suisse pour des ­raisons de conformité ou de sécurité. Nous avons l’avantage de combiner la force d’innovation d’AWS et l’ancrage local de ­Swisscom.

Comment l’offre AWS s’inscrit-elle dans la stratégie de cloud public de Swisscom?

Le cloud public est définitivement établi en Suisse et le marché continue de croître fortement. Chez Swisscom, nous avons décidé dès 2017 de nous focaliser sur AWS et Microsoft Azure pour nos offres de cloud public destinées à la clientèle entreprise. C’est aussi ce qui nous permet de proposer des offres multi-cloud à nos clients. Nous avons des partenariats stratégiques avec ces deux fournisseurs cloud qui nous permettent d’accompagner ­encore mieux nos clients dans leur cheminement vers le cloud.

Lorsque vous conseillez vos clients, quels critères décident du choix de tel ou tel fournisseur cloud pour leurs projets de numérisation?

L’empreinte actuelle du client, ce qui est en production, joue ­souvent un rôle décisif dans le choix de l’une ou l’autre solution de cloud public. Les entreprises ne veulent pas ajouter de la complexité à leur environnement IT. Les questions de licence jouent également un rôle important. Il sera moins facile pour une entreprise travaillant depuis des années avec Microsoft de convaincre ses collaborateurs d’opter pour une solution AWS. Nous accompagnons nos clients dans leur processus de décision, en tenant compte de leurs besoins individuels, mais le choix du fournisseur de cloud public revient en fin de compte au client. En général, les caractéristiques de base – qu’il s’agisse de coûts, de performance, de sécurité et de disponibilité – se ressemblent ­entre les offres des fournisseurs de cloud public et ce ne sont souvent pas les critères de choix décisifs. De notre point de vue, davantage que le choix du fournisseur cloud, il importe que nos entreprises clientes répondent à ces questions: «Comment le cloud peut-il profiter à mes objectifs commerciaux? Quels nouveaux services ou offres voulons-nous mettre à disposition de nos clients? où pouvons-nous les produire le plus efficacement?»

Swisscom transforme également son propre modèle vers une approche cloud native, et ce avec AWS comme fournisseur cloud privilégié pour sa propre informatique. Pourquoi avoir opté pour AWS dans ce contexte?

Swisscom souhaite faire avancer sa stratégie 5G et télécom en collaboration avec AWS. Après un examen approfondi de due diligence, il s’est avéré que l’offre globale d’AWS était la plus en ligne avec notre stratégie. En migrant vers AWS, Swisscom achève sa mue d’entreprise télécom en entreprise technologique.

Comment les entreprises clientes de Swisscom profitent-elles de l’expérience que vous avez acquise dans votre propre transformation vers le cloud?

Nos clients en profitent bien sûr énormément, car nous avons beaucoup appris et continuons d’apprendre tout au long de notre cheminement vers le cloud avec AWS. Nous avons développé des best practices qui se matérialisent dans des blueprints et des automatisations, que nous pouvons mettre à disposition de nos clients avec peu d’adaptations. En tant que Swisscom, nous ­voulons et devons satisfaire les standards les plus élevés, et nos clients profitent des questions que nous avons déjà clarifiées dans les domaines de la sécurité et de la conformité. Vu que nous sommes en quelque sorte notre plus gros client, nous pouvons partager notre expérience avec nos clients B2B dans les secteurs les plus divers. Nous disposons d’un savoir-faire étendu sur la manière de mettre en œuvre avec succès des modèles de cloud public et cloud hybride.

Comment Swisscom soutient-elle concrètement les entreprises dans leur transformation vers le cloud?

Les hyperscalers ont développé des frameworks d’adoption cloud adaptés à leurs offres. Nous nous orientons nous-mêmes sur ces best practices pour exploiter au mieux les avantages du cloud public. En nous appuyant sur ces canevas, nous avons toutefois élaboré notre propre framework neutre d’adoption du cloud, qui s’oriente sur notre démarche agnostique et peut être appliqué à différents fournisseurs. Dans le cadre de nos prestations de conseil dans le domaine cloud, nous proposons en outre à nos clients un conseil global en matière de stratégie, d’implémentation, de migration, de conformité, de sécurité et d’exploitation, ainsi que des stratégies de sortie du cloud. Pour que l’adoption du cloud soit un succès, il faut que la stratégie cloud de l’entreprise soit avant tout axée sur ses objectifs business. Dans la transformation vers le cloud, la rentabilité est une question centrale. Pour les entreprises, le cloud peut être un multiplicateur de force, un catalyseur, mais aussi ouvrir des possibilités entièrement nouvelles, voire de nouveaux domaines d’activité. Les organisations doivent toutefois veiller à ne pas présumer de leur propre compréhension du cloud et à ne pas prendre de mauvaises décisions qui entraîneraient des coûts inutiles.

Au-delà du cloud, quels sont les autres éléments d’une stratégie de numérisation?

Il faut tout d’abord distinguer la numérisation de la transformation numérique. La numérisation consiste à optimiser les processus et les manières d’opérer existants à l’aide de nouvelles technologies. En revanche, les entreprises qui envisagent une transformation numérique repensent l’ensemble de leur modèle d’affaires et envisagent les possibilités offertes par les nouvelles technologies. Les organisations qui se préparent à une transformation numérique devraient se poser la question suivante: à quoi ressemblerait mon entreprise si je démarrais aujourd’hui? L’accent doit être mis sur les clients et leurs attentes, ou encore sur l’organisation et la culture d’entreprise, mais pas sur les possibilités technologiques de mise en œuvre. Les organisations ­doivent savoir ce qu’elles entendent par transformation numé- rique et ce qu’elles veulent atteindre par ce biais. Les aspects techniques ne deviennent centraux que lorsqu’on a clairement établi les objectifs de l’entreprise.

Pourquoi le cloud est-il un aspect si central dans une stratégie de numérisation?

De nombreux nouveaux modèles d’affaires ne voient le jour que grâce à la transformation numérique et aux possibilités offertes par les clouds publics. Le cloud permet à l’informatique de passer du statut de facteur de coûts à celui de facilitateur de business. Avec leurs services d’infrastructure (IaaS) et de plateforme (PaaS) presque infinis – comme l’IoT, les données ou l’IA – les clouds offrent une gigantesque boîte à outils qui, si elle est utilisée correctement, accélère l’innovation et aide à raccourcir le temps de mise sur le marché. Les entreprises qui n’agissent pas dans ce domaine se retrouvent à la traîne. Il suffit d’observer les start-up technologiques d’aujourd’hui: ce sont des entreprises cloud native. Les générations Z et Alpha se sentent à l’aise dans de tels environnements. Ils veulent travailler avec la technologie la plus récente. Les entreprises qui passent à côté de la transformation numérique seront non seulement dépassées par les entreprises technologiques innovantes, mais elles auront également du mal à trouver des apprentis et des employés parmi les Digital Natives. Ces derniers ne veulent pas de systèmes et technologies obsolètes.

l‘interviewé

Andrea Meier travaille depuis sept ans chez Swisscom. D’abord responsable de la mise en place et de la mise en service du cloud d’entreprise (privé) 4SAP de Swisscom, il travaille depuis quatre ans dans le domaine des clouds publics. Depuis 2021, il est responsable avec son équipe de ­Microsoft Azure, AWS et des solutions hyb­rides. Auparavant, il a travaillé dans le conseil stratégique des CFF. Andrea Meier est titulaire d’un bachelor en gestion d’entreprise, d’un EMBA en Leadership et ­Management et de diverses certifications pour Microsoft Azure et AWS.