Turc mécanique

Les voitures autonomes seront-elles assistées par des chauffeurs à distance?

Spécialisée dans les véhicules autonomes, la start-up Cruise recourt à des opérateurs à distance pour pallier la difficulté des systèmes intelligents dans des situations inédites. Elle y voit une solution pérenne de nature à rassurer les passagers. Un modèle pour d’autres domaines?

Cruise mise sur des opérateurs à distance à même d'intervenir lorsque le système autonome faillit. (Image: Cruise)
Cruise mise sur des opérateurs à distance à même d'intervenir lorsque le système autonome faillit. (Image: Cruise)

Soutenue financièrement par General Motors, Honda et Microsoft, la start-up Cruise développe des voitures autonomes. Enfin pas totalement apprend-on dans un article de Reuters. En fait le système de Cruise recourt à des opérateurs humains à même de prendre le contrôle du véhicule distance en cas de besoin. Les systèmes intelligents peinent en effet à réagir dans des situations totalement inédites et les automobiles peuvent se retrouver paralysés. Les «télé-chauffeurs» qui surveillent plusieurs véhicules autonomes sur des écrans depuis leur «tour de contrôle» prennent alors le relais pour débloquer la situation.

Cruise n’est pas le seul spécialiste des véhicules autonomes à faire appel à des opérateurs humains. Le géant automobile sud-coréen Hyundai a investi Ottopia, une start-up qui fournira une assistance à distance pour les flottes de robotaxi de sa joint venture Motional. Egalement spécialiste du domaine la jeune pousse Pony.ai (soutenue par Toyota) s’appuie aussi sur des assistants humains. Ces derniers «disposent d'un bouton rouge qui peut arrêter le véhicule au cas où quelque chose se produirait», a déclaré James Peng, CEO de Pony.ai, à Reuters.

Gage de confiance

Pony.ai envisage de se passer d’opérateurs surveillant les véhicules en continu des l’an prochain - une assistance humaine restant disponible en cas de problème. Interrogés sur le sujet par Reuters, les start-up Waymo (Alphabet-Google) et Argo (soutenue par Ford et Volkswagen), ont refusé d’indiquer si elles envisageaient le recours à de tels superviseurs.

Cruise est en revanche la première entreprise du domaine a déclarer cette solution pérenne. Pour la start-up, les opérateurs ne sont pas seulement un remède aux limites des systèmes intelligents actuels, mais une solution ayant l’avantage de rassurer les conducteurs (ou plutôt les passagers). «Je peux offrir à mes clients la tranquillité d'esprit en sachant qu'il y a toujours un humain pour les aider en cas de besoin. Je ne vois pas pourquoi je voudrais m’en priver», explique Kyle Vogt, CEO de Cruise.

Nouveaux télé-experts

L’idée de pallier les limites des systèmes intelligents au moyen d’humains n’est pas nouvelle. Les entreprises font de même lorsqu’elles déploient des robots RPA en mode «attended» et transfèrent la résolution des exceptions à leurs collaborateurs. Si l’IA et les robots s’avèrent très efficaces pour les situations usuelles pour lesquelles ils ont été entraînés ou programmés, leur performance est souvent désastreuse face à des situations inédites.

Si aujourd’hui, les entreprises peuvent recourir à des humains compétents pour traiter ces cygnes noirs, on peut légitimement se demander si à l’avenir elles disposeront de telles compétences de secours. C’est en général en pratiquant pendant longtemps des situations routinières qu’on développe la capacité de répondre à une situation insolite, et les systèmes intelligents risquent de priver les collaborateurs de cet apprentissage de terrain.

Pour répondre à ce défi du déclin des compétences, le modèle de télé-assistance humaine développé pour les véhicules autonomes va sans doute faire des émules dans d’autres domaines. On pourrait imaginer des télé-comptables, des télé-marketers, des télé-recruteurs hyper-spécialisés intervenir à distance pour résoudre les situations d’exception non-prises en charge par les systèmes automatisés.

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