Télécommunications

Philippe Roditi, VTX: «La proximité est toujours restée le maître-mot de nos acquisitions»

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par Interview: Hélène Lelièvre

Actif sur tous les secteurs du marché des télécommunications, l’opérateur romand VTX Telecom a fêté l’an dernier ses 25 ans d’existence. Philippe Roditi, cofondateur et directeur de la société, revient sur le parcours de son entreprise et sur la stratégie qui lui a permis de s’étendre en Suisse alémanique.

Philippe Roditi, cofondateur et directeur de VTX Telecom.
Philippe Roditi, cofondateur et directeur de VTX Telecom.

Vous avez récemment fêté les 25 ans d’existence de votre société, pouvez-vous revenir sur l’histoire de votre entreprise?

En 1986 avec Francis Cobbi, qui était comme moi ingénieur à l’EPFL, nous avons réfléchi à la manière de nous lancer sur le marché du Vidéotex qui était alors en phase d’expérimentation dans notre pays. Le vidéotex, c’est un peu le minitel suisse. Le problème est que contrairement à ce qui se passait en France avec le minitel, il fallait des serveurs avec une infrastructure très lourde pour offrir ce service. Nous nous sommes donc associés avec Joseph Toledano, un informaticien parisien et nous avons repris la technologie du minitel pour l’adapter au modèle suisse. Nous sommes très vite devenus le premier acteur du vidéotex, en proposant des services de création de page et d’hébergement. Notre structure de coût moindre nous a donné un avantage compétitif important. En 1994, quand les PTT de l’époque ont voulu privatiser le vidéotex, nous avons racheté le parc de terminaux en location pour les gérer. Un an plus tard, nous nous sommes naturellement dirigés vers les services internet dans la mesure où ce n’était que la continuité du vidéotex.

Lorsque vous avez fondé la société, vous étiez trois. Aujourd’hui VTX Telecom compte deux cents collaborateurs. Quelle a été votre stratégie de croissance?

D’abord, nous avons eu l’occasion de créer une société sœur à Neuchâtel pour remporter un marché local. Elle fonctionnait selon un modèle de partage des revenus et des tâches qui correspondait à la mentalité suisse, à savoir de rester local. Nous nous sommes installés de la même manière à Genève et au Tessin. Par la suite, en 1999, nous avons regroupés les sociétés sous une holding du nom de VTX Telecom SA et ouvert notre capital à des fonds d’investissements européens. C’est ce qui nous a permis de développer notre entreprise par le biais d’acquisitions. La proximité est toujours restée le maître-mot de ces acquisitions. Notre cible est depuis toujours composée de sociétés localement bien implantées mais qui n’ont plus les moyens de se développer.

Comment procédez-vous quand vous avez racheté une société?

Nous avons à cœur de conserver le fondateur de l’entreprise à la tête de la nouvelle entité. Il conserve une forte autonomie au niveau local. C’est un élément clé de notre stratégie parce que l’entrepreneur a créé cette société. Il en est le principal pilier. Il est attaché à sa marque, à son équipe et à ses produits. La marque, son équipe et ses produits sont donc également maintenus. Nous accolons simplement le nom VTX au nom original. Les compétences du personnel sont mises à profit et les produits entrent dans le portefeuille de VTX au niveau national.

C’est cette stratégie qui vous a permis de vous implanter en Suisse alémanique?

Il est vrai qu’en Suisse il est difficile de vendre depuis la Suisse romande des produits à des personnes basées en Suisse alémanique. Nous avons d’ailleurs essayé d’implanter un bureau et un commercial à Zurich. Mais cela s’est avéré un échec. Les acquisitions n’ont jamais posé ce genre de problèmes parce que nous sommes des entrepreneurs qui parlons à des entrepreneurs. Ce sont des gens comme nous, qui partagent les mêmes valeurs et le même investissement envers leur entreprise. Pour autant, vis-à-vis des clients et notamment des clients business qui représentent les deux tiers de notre chiffre d’affaires, le fait que l’entreprise appartienne à un groupe rassure sur sa solidité. Et cette stratégie semble porter ses fruits puisqu’aujourd’hui notre clientèle se répartit pour moitié en Suisse romande et l’autre moitié en Suisse alémanique.

Allez-vous continuer à racheter d’autres sociétés?

Si nous trouvons de bonnes opportunités, nous nous y intéresserons. Mais nous avons moins besoin de nous étendre. Nous comptons actuellement neuf filiales. Nous ne sommes pas encore assez présents dans certaines régions, notamment en Suisse centrale. Nous préférons néanmoins miser sur le développement de nouveaux produits et sur le dégroupage en équipant nos propres centraux.

En mars dernier, vous avez lancé une offre fibre disponible dans tout le pays. Que pensez-vous du modèle de développement actuel du réseau fibre?

En ce qui nous concerne, nous ne pouvons nous permettre de construire le réseau parce que c’est trop coûteux. Le modèle actuel nous convient à peu près car il nous permet de nous appuyer sur les fibres nues disponibles. Je pense cependant que la fibre doit être strictement régulée. En effet, si les acteurs jouent le jeu de la concurrence aujourd’hui, il n’y a aucune garantie que cette situation perdure dans le futur. Il n’est pas trop tard pour réguler la fibre.

Comment résiste-t-on face aux géants du secteur?

Naturellement, avec nos 70 millions de francs de chiffre d’affaires par an, soit dix fois moins que le plus petit des quatre grands opérateurs télécoms, upc Cablecom compris, il y a naturellement un effet de taille. Mais je crois que nous pouvons dire que nous sommes les leaders de la ligue nationale B. Pour se démarquer, la question de la proximité est un élément essentiel. Les PME qui s’adressent à un grand acteur n’obtiendront pas nécessairement la même écoute que chez nous. Parfois, elles ont même affaire à un centre d’appel. Nous avons une approche différente du marché. Chaque PME a toujours le même interlocuteur chez nous. Hormis Swisscom, nous avons presque autant de commerciaux que les grands opérateurs. Au niveau du support technique, nos temps de réponses sont les plus courts du marché. Le support à la clientèle est une charge lourde pour nous mais il est essentiel. L’autre élément important de notre stratégie est d’être toujours à la pointe de l’innovation. A chaque nouvelle libéralisation du marché des télécoms, nous avons été les premiers acteurs du domaine, que ce soit dans le vidéotex, internet ou encore le dégroupage. Par ailleurs, nous sommes en train de finaliser le développement d’un central téléphonique entièrement virtuel et nous aurons prochainement notre propre offre de télévision.

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