Interview DSAG

Ce que SAP doit encore expliquer à ses clients

par Interview René Jaun (traduction/adaptation ICTjournal)

Les solutions loud ont du mal à s’imposer chez les utilisateurs SAP - et c'est notamment la faute de SAP lui-même, estime Jean-Claude Flury, directeur pour la Suisse du groupe d'utilisateurs SAP germanophones (DSAG). Il appelle l’éditeur à devenir plus flexible et à communiquer plus clairement.

Jean-Claude Flury, directeur pour la Suisse du groupe d'utilisateurs SAP de langue allemande.
Jean-Claude Flury, directeur pour la Suisse du groupe d'utilisateurs SAP de langue allemande.

Selon une enquête menée auprès des membres de DSAG à l’été 2021, plus de la moitié des personnes interrogées continuent à utiliser des solutions sur site. Pourquoi en est-il ainsi?

Avec une solution cloud, les entreprises se placent toujours dans une certaine dépendance, d’où un certain scepticisme. Dans le cas de SAP, il faut ajouter que les modèles de prix des solutions cloud sont loin d’être clairs. En outre, certaines solutions sont proposées sous forme hybride - donc pour une application en partie sur site et en partie dans le cloud - et il n’est pas toujours évident de savoir quelle est l’orientation réelle du développement des fonctionnalités. C’est pourquoi il y a des craintes. Pas contre le cloud en tant que tel, mais envers la présentation de la solution. Dans de nombreux domaines, il manque tout simplement des roadmaps claires de SAP sur la manière dont les processus de bout en bout pourront se présenter à l’avenir et sur la manière dont les modèles de licence seront conçus à cet effet.

Y a-t-il des différences sectorielles concernant l’adoption de SAP dans le cloud?

Il ya en effet des différences qui résultent d'une part des prescriptions réglementaires: certains secteurs - par exemple les services financiers ou le secteur public - réglementent plus strictement l'utilisation du cloud. Il existe également des contraintes de disponibilité, en particulier dans le secteur manufacturier, où il faut disposer de systèmes de production en temps réel à la périphérie. Les entreprises qui ne font que du commerce sont assurément davantage prédestinées à utiliser les services cloud de SAP que celles qui disposent de différents sites de production avec des applications très variées.

À quelles entreprises déconseilleriez-vous actuellement de passer au cloud?

Je ne le déconseillerais à personne en général. Mais il faut y regarder de plus près et être au clair sur ses motivations. Si le seul objectif est d’économiser de l'argent, cela ne fonctionnera pas. Pour les entreprises soumises aux contraintes que j’ai mentionnées, il est actuellement plus difficile d'aller vers le cloud pour ces mêmes raisons. C'est pourquoi on ne peut pas pour l’heure conseiller de manière générale de cloudifier l'ensemble de leur environnement IT.

Et inversement, qui devrait, selon vous, se lancer dans le cloud?

En principe, tous ceux qui prévoient des renouvellements importants de leurs applications et qui sont prêts à appliquer des processus standard et des bonnes pratiques.

Vous avez évoqué le modèle de licence SAP, auxquels le DSAG reproche d’être beaucoup trop rigides pour le cloud. Comment SAP doit-il s'améliorer dans ce domaine?

Nous attendons des améliorations significatives de la part de SAP et ne sommes pas satisfaits des augmentations actuelles de la maintenance dans le cadre des contrats en cours. Malheureusement, il n'y a pas encore eu d'accord à ce sujet. La mise à l'échelle est un autre sujet. SAP n'a pas que des gros clients, mais aussi d'innombrables entreprises utilisatrices de la classe moyenne qui, jusqu'à présent, achètent des licences coûteuses en quantités qu'elles n'utiliseront jamais. Dans ce domaine, SAP doit se montrer plus flexible avec ses métriques de licence - et ce vers le bas!

Cet été, SAP a introduit une augmentation annuelle automatique des prix pour ses services cloud. L'entreprise a été critiquée pour cela par l'IG SAP. Que pense le DSAG de cet automatisme?

Dans le contexte de la crise économique qui s'annonce, les augmentations de prix sont un mauvais signal. C'est ce qu'a clairement expliqué Thomas Henzler, notre directeur technique pour le domaine Licences, Service & Support, lors du congrès annuel. Hors du noyau ERP proprement dit, il y a finalement aussi d'autres éditeurs qui se retrouvent ainsi naturellement dans le champ de vision des entreprises. Salesforce n'est qu'un exemple parmi d'autres. On parle alors tout à coup de "best-of-breed" et non plus de "best-of-suite" au sein d’un univers purement SAP.

Dans une enquête récente, un sondé sur cinq déclare avoir une attitude négative ou très négative envers les solutions SAP dans le cloud. Comment SAP peut-il faire les faire changer d'avis?

Si l'on veut faire passer son système S/4-Hana dans le cloud, il s'agit bien sûr d'un pas beaucoup plus important que si l'on n'introduit que certains composants, par exemple dans la planification, qui ne fonctionnent en partie plus que dans le cloud. SAP doit simplement informer ses clients le mieux possible et leur montrer clairement où le voyage vers le cloud les mènera. Les clients doutent aussi que SAP soit un partenaire fiable en tant que Cloud Company. C'est un gros problème, en particulier pour les solutions sur site sans produit de remplacement clair. En ce qui concerne le noyau ERP, nous avons des annonces et des délais fiables pour savoir jusqu'à quand les solutions ECC actuelles seront encore supportées. Mais il en va autrement pour les solutions cloud. SAP fait certes la promotion de son programme Rise, mais ce qui se cache exactement derrière n'est pas forcément évident au premier coup d'œil. Ainsi, le rapport d'investissement de DSAG a montré que les connaissances des entreprises suisses sur "Rise with SAP" peuvent encore être fortement développées. 61% des personnes interrogées en ont déjà entendu parler, mais ne sont pas encore familiarisées avec l'offre. Cela en dit long.

Comment les entreprises peuvent-elles s'assurer que leur migration SAP vers le cloud se déroule le mieux possible?

La condition de base est une bonne préparation. Cela signifie standardiser et adapter les processus, former et accompagner les employés, nettoyer les données de base, etc. En règle générale, lorsqu'on démarre un projet de cloud computing, le manque de planification et de vision de ce que l’on veut faire est un chemin vers l’échec.

Tags
Webcode
DPF8_275899