Apprentissage

Médiamaticien, une formation encore méconnue entre marketing et informatique

| Mise à jour
par Hélène Lelièvre

La profession de médiamaticien se positionne comme un pont prometteur entre les domaines du marketing, du commerce, du multimédia et de l’informatique. Quinze ans après sa création, elle reste encore confidentielle. Rencontre avec les acteurs de la filière: professeurs, élèves et anciens élèves, employeurs.

Etudiants au Centre professionnel du Nord vaudois (CPNV)
Etudiants au Centre professionnel du Nord vaudois (CPNV)

Secteur en forte croissance, les TIC pourraient manquer de 25 000 spécialistes d’ici à 2020, dont 9100 provenant des hautes écoles et 13 600 ayant une formation professionnelle. C’est ce qui ressort de l’étude «Situation des professionnels des TIC – Prévisions de formations 2020», réalisée par Econlab sur mandat d’ICT Formation professionnelle Suisse. Pour y remédier, les formations dans les filières informatiques devraient dans les prochaines années être encouragées. Dans ce domaine, la profession de médiamaticien, créée en 1997 par l’association Sigmedia à l’initiative de quelques collaborateurs de Swisscom, reste encore méconnue. C’est une formation où semble-t-il les étudiants arrivent encore par hasard, c’est notamment le cas d’Alberto Gomez, cofondateur de l’agence Antistatique, ou de Daniel Mendes, 23 ans, actuellement en formation professionnelle accélérée de médiamaticien: «Après le gymnase, je voulais me diriger vers un CFC multimédia et sur le site orientation.ch, il y avait un lien vers le CFC de médiamaticien. Je crois que cela correspondait mieux à mes attentes parce qu’il y avait aussi le côté marketing pour pouvoir présenter et vendre son produit.»

Une formation généraliste

Le CFC de médiamaticien se veut en effet un lien entre différents métiers de l’entreprise. Il se déroule sur quatre ans. Outre les matières de base de culture générale et notamment les langues qui restent au programme de l’enseignement, les apprentis se concentrent sur trois domaines: l’informatique, le commerce et le multimédia. Dans le domaine de l’informatique, les élèves apprennent les bases du hardware et du software, des  outils bureautiques, des systèmes d’exploitations Windows, MAC et Linux, mais aussi du réseau, des bases de données (SQL, etc.) et de la programmation (PHP, JAVA).

Durant leurs cours de commerce, ils étudient la comptabilité, comme le précise Marcel Jubin, doyen de la filière médiatique au Centre professionnel du Nord vaudois (CPNV) à Sainte-Croix: «Il ne s’agit pas de faire de la comptabilité pour une multinationale naturellement, mais un élève qui crée son entreprise sera capable de boucler ses comptes.» En plus des notions d’économie générale, du droit et de l’administration, tout au long de leur formation, les étudiants travaillent aussi sur des projets marketing. «Actuellement, un groupe prépare par exemple les portes ouvertes du CPNV en 2013», explique Yves Neuenschwander, directeur adjoint du CPNV. Dans le multimédia, la suite créative Adobe sert de base d’apprentissage à la production de flyers, de logos, au traitement des images ou encore à la réalisation de vidéos et même depuis peu la vidéo en trois dimensions…

Un stage pratique souvent bénéfique

La troisième année de la formation est entièrement dédiée à un stage en entreprise, en Suisse ou à l’étranger. «Une ancienne élève est même allée jusqu’en Chine, se félicite Marcel Jubin. Et cette année, une étudiante voudrait partir au Canada.» Grâce à la bourse Leonardo da Vinci, qui finance les stages pratiques dans le domaine de l’enseignement et de la formation professionnelle, les élèves peuvent facilement partir dans toute l’Europe. Durant cette année, quelques cours se déroulent en télé-enseignement. Des examens sont organisés de manière synchronisée quel que soit le lieu de stage.

Pour Gabriel Champrenaud, 21 ans et actuellement en quatrième année de CFC avec maturité intégrée, ce stage a été très bénéfique: «Durant mon stage, j’étais dans une entreprise de sanitaire dans laquelle il n’y avait pas de responsable informatique. On m’a donc confié la gestion du serveur de l’entreprise et des postes de travail. J’étais assez autonome mais si je n’y arrivais pas seul, je pouvais faire appel à des entreprises pour m’aider. Alors qu’avant de commencer mon CFC je voulais faire un métier créatif, mon stage m’a permis de découvrir que je préférais finalement l’informatique au graphisme.»

Pour les entreprises aussi cette formation peut être un atout, comme l’explique Laura Golaz, assistante marketing pour le Groupe MK et elle-même issue de la formation en médiamatique: «Pour les petites et moyennes entreprises, un apprenti qui a suivi cette formation est la personne idéale parce qu’il peut avoir un petit œil sur tout et parce qu’il continue à apprendre les langues. Actuellement, notre apprenti travaille sur le projet du Salon immobilier de Lausanne. Pour ce qui est du graphisme, il s’est notamment occupé des visuels, et dans le domaine du digital, il a travaillé au développement de bornes tactiles interactives.»

Passerelle vers l’emploi ou poursuite de la formation?

Sur les portails, peu d’offres d’emploi sont réellement libellées «médiamaticien». Alors quels sont les métiers auxquels conduit la formation de médiamaticien? «Les postes de webmaster, de creative graphic designer… peuvent aussi être pourvus par un médiamaticien», précise Marcel Jubin. Et Yves Neuenschwander de rassurer: «Chaque année, je me renseigne auprès de l’Office de placement d’Yverdon sur le nombre de chômeurs médiamaticiens dans le canton de Vaud. En moyenne, le pourcentage est toujours identique. Il tourne autour de 1% pour l’ensemble du canton et le plus souvent, il s’agit de chômeurs de courte durée.»
Nombreux sont d’autre part les nouveaux diplômés qui continuent des études après leur CFC de médiamaticien. En effet, d’après une enquête réalisée par le CPNV sur ses anciens élèves en médiamatique en 2009, 66% ont continué des études pour se spécialiser et 25% ont travaillé immédiatement. Cette tendance à la poursuite des études après un CFC semble d’ailleurs être propre au secteur des TIC. En effet, d’une manière plus générale, selon l’étude «Situation des professionnels des TIC - Prévisions de formations 2020», on constate que dans les TIC, seuls 26% des employés disposent uniquement d’une formation professionnelle initiale (contre 41% pour l’ensemble des professions en Suisse) et 44% ont fréquenté  les bancs des Hautes écoles (contre 23% au niveau de l’ensemble des professions).

La plupart des élèves et anciens élèves rencontrés par notre rédaction ont d’ailleurs confirmé qu’après le CFC de médiamaticien poursuivre des études était important voire nécessaire. Ainsi Laura Golaz: «La formation de médiamaticiens ouvre sur des métiers très généralistes, mais c’est une formation encore jeune qui n’est pas encore très ancrée dans les mentalités des employeurs. De mon côté, j’ai choisi de faire une maturité commerciale puis une formation de spécialiste en communication au Sawi. Mais c’est une formation que je trouve intéressante car elle nous permet de comprendre les notions de toutes les professions dans l’entreprise.»

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