Environnement virtuel

La collaboration virtuelle nuit-elle à la productivité?

Dans un environnement virtuel de collaboration, l’enjeu principal consiste à établir de la confiance entre employés. Pour ce faire, les leaders doivent savoir tisser des liens tout en évitant de créer une surcharge collaborative.

A l’heure de la globalisation, du cloud et du recours fréquent à des services externalisés, plus d’un tiers de la main-d'œuvre mondiale est aujourd’hui amenée à collaborer en mode virtuel. Nicola Millard, docteure en psychologie et Customer Experience Futurologist chez BT Global Services, part de ce constat pour explorer les enjeux d’un monde du travail où les collaborateurs communiquent toujours plus à l’aide de technologies plutôt qu’en face à face. Dans son livre blanc «The collaboration conundrum», la spécialiste en interaction homme-machine explique que l'un des challenges fondamentaux des environnements virtuels de collaboration a trait à la difficulté d'y construire une cohésion reposant sur de solides liens de confiance. La faute notamment à un manque – voire une absence – de messages paraverbaux (intonations et modulations de la voix) et non verbaux (langage corporel), ces informations précieuses que l'on perçoit sans même s'en rendre compte dans les échanges en face à face.

Les leaders deviennent des connecteurs

Pour la spécialiste, le leadership joue un rôle crucial pour tisser des liens solides entre collaborateurs ne partageant pas le même bureau. Mais pas question de commander et contrôler, les environnements virtuels ne permettant pas d’avoir chaque employé à l’œil en permanence. Les managers sont en revanche appelés à adopter un comportement ouvert, à jouer un rôle de connecteur et à s’impliquer dans la construction d’un langage partagé, d’une identité commune. Les leaders d’équipes virtuelles doivent savoir accorder une confiance par défaut aux collaborateurs, pour qu’entre eux puissent ensuite se mettre en place la cohésion nécessaire à une collaboration efficace.

Nicola Millard émet aussi quelques réserves à l’égard des réseaux sociaux d’entreprise. Elle souligne que sans leadership adapté, ces outils sont au pire snobés, ou ne créent que des connexions faibles ne permettant pas l’établissement d’une confiance réciproque. De plus, même l‘existence de solides liens de confiance ne suffit pas à générer une réelle collaboration: sans but partagé clairement défini par le management, les réseaux sociaux ne stimulent pas les comportements collaboratifs et se limitent à leur stricte fonction de communication. Les leaders ont dès lors intérêt à véhiculer une motivation commune au sein d’une équipe travaillant en mode virtuel.

Biais et excès collaboratifs

Pour l’experte, une mauvaise gestion de la connexion permanente stimulée par les outils numériques peut mettre à mal la productivité. Si les leaders doivent aujourd’hui promouvoir et récompenser les comportements de collaboration, il faut cependant prendre garde à ne pas créer de surcharge collaborative: les employés les plus compétents et utiles risquent en effet de devenir victimes de leur propre succès en étant débordés par de constantes demandes d'aide. La spécialiste poursuit son analyse en évoquant un autre piège pour les leaders: des employés auront tendance à communiquer plus intensivement sur leurs projets dans l’intention de passer comme productifs alors qu’ils sont, en réalité, moins efficaces que ceux qui se contentent d’accomplir leurs tâches.

Pour Nicola Millard, la communication virtuelle et la maîtrise raisonnée des technologies collaboratives font aujourd’hui partie des clés du succès d’une entreprise. C’est à la communication interne de promouvoir la collaboration et aux RH de favoriser les profils socialement compétents. C’est aux managers d’instiller un objectif commun et à l’IT de déployer les outils adéquats. Or, qui dans l’entreprise coordonne ces différentes dimensions et en saisit tous les tenants et aboutissants? Aux yeux de l‘experte, pour faire face à ces défis, les compagnies profiteraient sans doute de la mise en place d’une fonction de Chief Collaboration Officer.

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